13 novembre 2021

Accorder le droit de vote aux étrangers? Nous avons posé la question à Jean-François Lovey


Entremont Autrement vous propose, via une série d'articles, de découvrir les travaux en cours à la Constituante valaisanne. Aujourd'hui, nous allons à la rencontre de Jean-François Lovey d'Appel Citoyen et constituant domicilié à Orsières. Nous avons voulu comprendre d'où venait cette proposition d'accorder le droit de vote aux étrangers.


A l’issue de la première lecture, l’Assemblée constituante a décidé d’accorder le droit de vote aux étrangers au niveau communal. Pourquoi cette disposition est importante selon vous ?

Parce qu’elle renvoie à des valeurs qui nous sont essentielles et qui sont porteuses d’ouverture pour l’avenir du canton. Le respect de la personne humaine doit aller jusqu’à permettre à celles et ceux qui obéissent à des règles communes de participer à leur élaboration. Vivre dans un village ou un quartier, y élever sa famille, y travailler, inscrire ses enfants à l’école, faire partie de sociétés locales, payer ses impôts, partager la quotidienneté de ses voisins donnent aux personnes des responsabilités certes, mais également des droits. En reconnaître la pertinence, c’est viser à une insertion sociale réussie. Le contraire, c’est un mélange préjudiciable d’intégration incomplète et de mise à l’écart. Cela n’a plus de sens ni de dignité aujourd’hui.

Est-ce que les étrangers qui veulent vraiment prendre part à la vie de leur communauté ne doivent pas viser la naturalisation ?

Devenir suisse relève d’une autre volonté. D’une autre visée. On en connaît le cheminement et l’aboutissement. Tous deux respectables. Mais obtenir le droit de vote et d’éligibilité à l’échelle communale appartient à un autre registre. Celui de la légitimité proche. Quand on vit pleinement dans un village ou un quartier jusqu’à une implication comparable à celle de tous les citoyen.nes, on peut légitimement aspirer à un droit de vote et d’éligibilité qui fait de chacun.e un être participant pleinement à la vie de la communauté. On peut être partie prenante de la vie locale, élire et voter localement, tout en restant italien, espagnol ou portugais.

Quels sont les critères donnant accès à ce double droit de vote et d’éligibilité ?

Pour pouvoir accéder à ce double droit au plan communal, il faut posséder un permis d’établissement (permis C) qui s’obtient après 10 ans de domiciliation en Suisse, voire 5 ans si l’intégration est particulièrement visible. L’étranger.ère doit être établi en Valais depuis au moins 1 an et être domicilié dans la commune concernée. On voit bien que les contraintes exigées éliminent tout arbitraire ou toute facilité exagérée.

Pourquoi ne pas avoir étendu ce droit à l’échelon cantonal ?

Parce qu’une majorité de la Constituante ne l’a pas voulu. Appel Citoyen le regrette.

Dans d’autres cantons, les personnes étrangères semblent ne guère profiter de ce droit accordé. N’est-ce pas une mesure surtout symbolique, à faible valeur concrète ?

Le symbole, - les valeurs qu’il sous-tend surtout -, est important. Mais au-delà de ce signe d’élargissement démocratique, il y a toute une image du canton que les Valaisan.nes entendent donner aux générations à venir. Celle, prioritairement, d’une société juste, solidaire et généreuse. Et ce n’est pas rien. 

Ne prenez-vous pas le risque, avec cette disposition, de fédérer les oppositions et de faire échouer l’ensemble de la révision ?

Comme dans tout texte d’ambition globalisante, le risque d’un rejet pour un élément parmi d’autres existe. Nous en sommes conscients. Mais les prétextes peuvent être multiples de cacher sous sa fibre conservatrice les raisons de dire non à l’innovation. Plus de 70% des Valaisan.nes qui ont voulu un changement de la Constitution attendent de nous autre chose qu’un exercice de cosmétique ou de frilosité.

Merci à Jean-François Lovey d'avoir accepté de répondre à nos questions.




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