24 avril 2020
Faut-il prolonger le confinement ? - L'angle philosophique
Dans mon dernier article nous nous étions brièvement penchés sur l’angle sanitaire de la question du titre sans tirer de réponse claire, et l’article ci-dessous a pour prétention de se concentrer sur le pan philosophique de ce confinement.
Quand on constate qu’en France il faut avoir une raison notifiée sur un papier pour pouvoir sortir et qu’on ne peut pas être deux dans une voiture, ou quand on entend le souhait de certains gouvernements d’imposer un suivi des individus à travers des bracelets ou une application pour suivre nos déplacements et savoir avec qui on entre en contact, on peut se demander si ça ne va pas un peu trop loin.
On peut faire le parallèle avec la sécurité: Est-ce que vous seriez prêts à mettre des caméras dans toutes les rues et à implanter une puce et une caméra avec micro à tout le monde? Non? Cela permettrait pourtant de réduire la criminalité à néant! Imaginez: moins de violence, moins de harcèlement, difficile de faire mieux en matière de sécurité!
Non, cela parait impossible à accepter je pense (j’espère!) pour chaque d’entre nous. Nous ne sommes donc pas prêts à sacrifier totalement notre liberté au profit de notre sécurité, mais jusqu’où pouvons-nous aller pour notre santé?
Il est intéressant de comparer comme la réaction européenne a évolué en un demi-siècle. La grippe de 1968 a fait un million de morts dans l’indifférence alors qu’aujourd’hui, les états prennent des mesures drastiques pour contrer ce virus et de nombreuses voix continuent de trouver cela insuffisant, que c’est-il passé dans cet intervalle? La superstition a cédé sa place à la science, ce qui est une bonne chose. Sauf que la superstition rend humble, impuissant face à des évènements qu’on ne maitrise pas quand la science rend orgueilleux et donne une impression de contrôle et de maitrise sur ce qui nous arrive. Nous n’acceptons plus de pouvoir mourir d’une grippe, de ne pas pouvoir vaincre une épidémie.
Est-ce qu’on va trop loin? C’est en tout cas ce que pense un philosophe que je trouve souvent très pertinent: André Comte-Sponville. Ce dernier livrait un interview dans le Temps un brin provocateur dans lequel il s’insurgeait de la situation actuelle. Il reproche à l’Etat de supprimer nos libertés au profit de la santé et surtout de sacrifier la nouvelle génération au profit des personnes âgées. Il craint ce dont nous avons parlé précédemment et qu’il appelle le Pan-médicalisme, une idéologie qui attribuerait tout le pouvoir à la médecine.
On peut relativiser en lisant les déclarations de Trump qui proposait cette semaine un traitement à base de désinfectant et de lumières UV: pour le président étasunien, il est clair que donner plus de pouvoir à la médecine (y compris psychiatrique) ne pourrait pas être nocif mais il est également vrai que de nombreuses personnes « à risque » sont insatisfaites de la situation et estiment que c’est à elles de décider si elle veulent ou non courir le risque de s’exposer au virus.
Finalement, là encore, il n’y a pas de réponse éthique satisfaisante. Si une personne par choix, ne respecte pas l’avis médical, en l’occurence le confinement, mais que ce faisant elle répand le virus et cause la mort d’autres personnes, est-ce acceptable? Dans cette situation il semblerait que non, mais pourtant, la logique de la vaccination est la même et un grand nombre de personnes peuvent pourtant refuser de se vacciner…
5 commentaires:
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Intéressant de se demander jusqu'à quel point nous sommes prêt à sacrifier notre liberté pour la sécurité.
RépondreSupprimerMalheureusement avant de se demander si il faut laisser une part de notre liberté à l'Etat pour notre sécurité il y aurait sans doute mieux à faire.
Par exemple, si, simplement on remettrai en question notre responsabilité ? Sommes nous suffisament responsables dans nos comportement ? (question qui peut s'appliquer pour le Coronavirus, ou pour la question climatique). Peut-être pas, au vu de la situation, mais à force de tout attendre des pouvoir publics on s'habitue à se dé-responsabiliser. On attend que l'Etat nous force la main, ou le fasse pour nous. Si cette responsabilité individuelle et collective ne s'était pas autant perdue au fil des années peut-être on pourrait toujours conserver un maximum de notre liberté.
Voilà ma pensée... Merci pour votre article intéressant qui a éveillé en mois plusieurs questionnement
Merci pour votre commentaire,
SupprimerLa question de savoir jusqu'où nous sommes prêts à sacrifier notre liberté et notre vie privée va se poser de plus en plus. Déjà parce que la technologie a des capacités de plus en plus pointue (une caméra peut reconnaitre quelqu'un à sa démarche aussi bien que par reconnaissance faciale) et que l'utilisation des bases de donnée et leur stockage permet actuellement de recueillir énormément d'informations sur des personnes de manière et de les vendre/acheter ne serait-ce qu'avec les informations recueillis sur les réseaux sociaux.
Un exemple parfait serait Cambridge Analytica, ce groupe qui a influencé plusieurs campagnes, notamment l'élection de Trump, grâce à ces données. Il y a un documentaire qui s'appelle "the great hack", disponible sur netflix à ce sujet.
De plus, c'est un sujet sur lesquels nos parlements ont énormément de retard, déjà parce que beaucoup de parlementaires n'ont pas conscience du sujet, et aussi parce que nos institutions ne sont pas taillées pour pouvoir répondre à d'aussi rapide changement de société, à voir comment cela évolue.
Sinon, pour la responsabilité civique de chacun, c'est vrai; plus l'état intervient, plus on a tendance à le personnaliser comme si c'était un vrai individu, un peu paternaliste et protecteur, et par ce biais on se dérobe à nos propres responsabilités de citoyens.
Après, le problème est qu'ici on a affaire à une problématique urgente pour laquelle il faut une réponse claire et totale. C'est valable autant pour le Covid que pour la question climatique. Or, il n'y a pas d'unité dans la population. Il y a toujours des négationnistes qui nient le dérèglement climatique ou d'autres qui en nient l'importance, et même chez les personnes qui comprennent le problème, certains trouveront que la Suisse ou eu-même en font déjà suffisamment, que ce n'est pas à eux d'agir, etc.
Donc oui, il y a sans doute une baisse de la responsabilité citoyenne individuelle, et il est probable que même si cette dernière était intacte, cela ne suffise pas...
Merci beaucoup d'avoir pris le temps de répondre, de manière pertinente. Et je m'en vai de ce pas regarder le reportage sur Cambridge Analytica sur Netflix.
SupprimerJ'adhère totalement aux propos d'André Comte-Sponville.
RépondreSupprimerJ'ai détesté la manière dont les 65 ans et plus, ces pauvres "personnes vulnérables" qu'il fallait sauver malgré eux, ont été infantilisées, voire mises sous tutelle, parfois par leur propre famille. Ces "personnes vulnérables", je les ai souvent croisées en pleine forme, arpentant à grands pas nos chemins pédestres, le sourire aux lèvres, le teint bronzé, sans peur d'attraper LE virus. Curieusement, la peur était souvent bien plus présente chez les quadras et les quinquas …
Une sexa qui s'assume tellement qu'elle poste un commentaire anonyme !!!
SupprimerComment aurait-on du réagir au mois de Mars alors que l'Italie comptait ses morts (de plus de 65 ans) par milliers ???
Qu'y a-t-il de plus normal et logique pour un fils ou une fille de vouloir protéger ses parents, ses enfants, sa famille quoi..
Alors oui, nous les quadras et quinquas avons suivi les recommandations du gouvernement à la lettre concernant nos aïeux, peut-être avec un peu trop de zèle, mais ne vous êtes vous jamais dit, "sexa qui s assume anonyme" que ce n'était qu'une preuve d'attachement et d'amour d'enfants envers leurs parents ?
peut-être, je dis bien peut-être, que sans ce zèle poussé à l extrême, il y aurait beaucoup moins de retraités qui arpenteraient les chemins pédestres aujourd'hui..
Alors vivez comme bon vous semble votre confinement, exposez votre teint bronzé ou vous voulez, et laissez nous nous inquiéter pour nos parents...même jusqu'à la démesure.