Messieurs les Présidents et vice-président de la Commune de Bagnes,
Madame et Messieurs les membres du Conseil,
Mesdames et messieurs les membres du comité d'organisation de la fête patronale,
Chers amis, chers invités,
J'ai bien conscience que les discours officiels ne constituent pas la partie la plus glamour de la manifestation de ce jour. Ils appellent un bref instant de silence (relatif d'ailleurs) pour permettre à vos élus locaux de vous apporter leur salut et pour remercier en votre nom celles et ceux qui contribuent chaque année au succès de la fête.
C'est donc une coutume ancestrale qui veut que la fête du 1er août commence par un instant de recueillement, à la chapelle, pour solliciter d'avance l'indulgence du Seigneur pour les excès éthyliques qui vont suivre.
C'est aussi la coutume qui veut que la jeunesse exprime bruyamment sa présence en tirant quelques coups de canon, qui symbolisaient sans doute à l'origine une manifestation de virilité plus moderne et plus efficace que le Morgenstern de nos aïeux.
Enfin, la tradition veut que le 1er août, quelques élus vous adressent des propos bien sentis, comme piqûre de rappel d'un patriotisme toujours un peu défaillant, autrement dit pour nous rappeler que si nous sommes Bagnards d'abord, puis Valaisans ensuite, nous sommes quand même des citoyens et des citoyennes d'un pays qui nous est commun : la Suisse. Nous sommes bien les dignes descendants des Waldstätten, même si nous avons longtemps hésité à nous ranger sous la même bannière que les Genevois, les Appenzellois et les Thurgoviens.
Mais qui s'en souvient encore ?
Aujourd'hui, la croix fédérale est devenue une enseigne de bistrot et le Grütli, cette prairie qui a servi de décor aux premiers serments d'amour échangés par nos ancêtres, n'évoque plus que les débordements sonores des groupies de Christof Blocher. Confisqué par un parti nationaliste, le patriotisme engendre vite la xénophobie, cette plaie à l'origine des camps de concentration de sinistre mémoire. La devise : "Les nôtres d'abord" donne le frisson. Elle condamne les autres à errer sans cesse à la recherche d'une terre d'accueil, au péril de leur vie, comme on l'a vu encore récemment sur la Méditerranée.
Il y a donc de bonnes raisons de se méfier des excès d'un certain patriotisme triomphant, plus prompt à exclure qu'à intégrer. En revanche, on peut, une fois par an, souligner les liens qui nous unissent à nos compatriotes et à nos compatriotes. Car le terme un peu désuet date encore d'une époque où les femmes n'avaient pas d'existence légale et où la patrie, le Vaterland, n'était que la terre de nos pères.
Nous pouvons donc nous réjouir, une fois par an, des bienfaits que nous apporte un pays démocratique et prospère comme la Suisse et savourer la chance que nous avons eue de voir le jour ici plutôt qu'au Bangladesh, en Amazonie ou au Biafra.
A mon sens, il n'y a pas à en tirer une quelconque gloire. Il y a simplement à dire notre reconnaissance aux femmes et aux hommes qui ont fait de la Suisse ce qu'elle est aujourd'hui et à poursuivre leurs efforts pour qu'elle garde le même attrait pour les générations qui vont nous suivre.
Je vous souhaite à tous et à toutes, une bonne fête et une excellente journée !
Antoine Cretton, Versegères, 1er août 2019 (12h20)
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