11 juin 2020

L’épée de Damoclès

Faut-il mettre un terme au plus vite à l’affaire des "constructions illicites" de Bagnes ? La réponse est oui, incontestablement. Faut-il s’en donner les moyens et accélérer les régularisations en cours? C’est aussi oui. En revanche, l’État devait-il adresser à la commune une "sommation" fixant un délai impératif ? Là, la réponse est plus nuancée.

D’abord, le Gouvernement sanctionne par sa sommation un rythme de travail jugé trop lent et non les fautes commises dans l’application des lois. C’est la justice qui devra se charger de ce volet. Le rapport Baechler sur lequel le Conseil d’État fonde son exigence a reconnu formellement qu’aujourd’hui, les dossiers sont traités avec la rigueur requise. Il reconnaît également que la Commune s’est attachée et s’attache encore à régulariser les anciens dossiers qu’il s’agit de revoir pour les mettre en conformité avec le droit.

En tant qu’autorité de surveillance, le Gouvernement doit fournir aide et conseils. Il s’est acquitté de cette tâche au rythme habituel d’une administration publique. Par exemple, en décembre 2018, la commune a détaillé les démarches entreprises en demandant qu’elles soient validées par l’État. Cette confirmation n’est arrivée qu’une année plus tard, et encore, par le biais du rapport Baechler. Dans l’intervalle, la Commune a poursuivi son travail sans savoir si le canton approuvait ou non la méthode utilisée. On notera aussi qu’au cours de toutes ces années, le Conseil d’État n’a cessé d’augmenter ses exigences, ce qui n’est guère rassurant lorsqu’on est soumis à des délais impératifs.

Aujourd’hui, le Conseil d’État menace la Commune de se substituer à elle si elle ne tient pas les délais imposés. Est-ce pour faire oublier le rôle qu’il a lui-même joué dans cette affaire, rôle mis sous une lumière crue par Claude Rouiller, ancien président du Tribunal fédéral, dans son expertise?

La menace brandie par le Gouvernement constitue une atteinte sévère à l’autonomie communale. Elle paraît d’autant moins justifiée que la Commune n’a jamais démontré qu’elle ne voulait pas s’acquitter elle-même de cette tâche, bien au contraire. Mieux encore, l’État lui demande d’examiner la révocation de décisions qu’il a lui-même entérinées sur recours des usagers, ce qui paraît pour le moins discutable. Pour le reste, l’autorité communale examine chaque dossier vicié et applique rigoureusement tout ce que prévoit la loi, ni plus ni moins.

Entre ceux qui souhaiteraient voir la Commune payer indéfiniment pour les fautes de quelques-uns et les adeptes des méthodes musclées, la marge de manœuvre légale est assez mince. Elle ne doit en aucun cas prétériter les citoyens qui, eux, n’ont pas mérité ça. Aussi, la Commune entend-elle poursuivre son travail et se donner tous les moyens utiles à son achèvement.

Elle aurait préféré le faire sans l’épée de Damoclès que son autorité de surveillance a si aimablement placé sur sa tête.

Antoine Cretton
Conseiller communal EA
Bagnes

L’expert Rouiller tenait même le Gouvernement pour responsable initial de toute l’affaire, pour avoir homologué un règlement communal qu’il savait non conforme à la loi.

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