15 novembre 2016

Faillite des élites? Quel gag!


Depuis une semaine, toute la presse analyse, décortique, dissèque l'élection de Donald J. Trump à la présidence des Etats-Unis pour en chercher les causes. Dès les premiers commentaires, on a lu qu'il s'agissait de la faillite des élites et d'une victoire du peuple sur l'establishment de Washington. Rien n'est moins sûr.

Le thème de la faillite des élites a été repris en France récemment, en pleine campagne des primaires chez les Républicains. Notamment par Nicolas Sarkozy et François Fillon qui, tous deux, ont fustigé "le système" dont ils sont, soit dit en passant, les plus purs produits: pour rappel, le premier a été Président de la République, le second son Premier Ministre. Au niveau des élites, on a connu pire.

De son côté, Marine Le Pen se positionne aussi comme une candidate "anti-élite", proche du peuple et éloignée des arrangements entre partis. Il serait bon de rappeler à cette dame qu'elle doit son poste de présidente du FN à l'oligarchie bien organisée par son illustre père. Elle est bien la première à qui s'applique le terme de népotisme qu'elle dénonce chez ses adversaires. La remarque vaut également pour sa nièce Marion Maréchal-Le Pen.

En Suisse aussi, le plus grand parti national surfe sur la vague de la lutte contre la classe politique, contre "les élites". Ce discours oublie pourtant que le grand timonier du parti n'est autre qu'un milliardaire à qui les médias ont déroulé un tapis rouge tout au long de sa carrière politique et qui ont largement omis de le replier à l'annonce de sa retraite.

Avec d'une part le système de milice que nous avons en Suisse, à tous les degrés du pouvoir législatif et dans les exécutifs communaux, et d'autre part la structure de notre système de concordance, il est totalement ridicule de parler de "classe politique" en Suisse. La plupart des politiciens helvétiques ont une autre activité professionnelle à côté de leur engagement public. Il est de plus très facile pour un citoyen lambda de se proposer à une élection, y compris sans organe de parti.

Une large part des contempteurs de cette soit-disant "élite" bénéficie d'une exposition médiatique qui surpasse souvent son poids électoral réel et dispose de financements de campagne importants. Aux Etats-Unis, Monsieur Trump lui-même ne partage pas grand chose avec ses électeurs: il est richissime, il appartient depuis de très nombreuses années au monde du show-business et à une oligarchie économique et n'a jamais vécu dans les zones pauvres ou rurales des états qui l'ont porté à la fonction suprême.

Aujourd'hui certains groupes d'intérêts tentent de mettre en avant une fracture entre le peuple et ses représentants, entre les bons travailleurs honnêtes et les vils politiciens corrompus. Ne vous laissez pas prendre par ce discours, souvent bien ciselé, qui ne reflète qu'une petite partie de la réalité et qui finalement ne fait que désigner de nouveaux boucs-émissaires.

J. Lovey

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