Rappel des faits:
Depuis plus d’une décennie, la commune de Bagnes souhaitait construire au centre de Verbier un parking souterrain. Elle avait acheté dans ce but un terrain dont la surface ne permettait pas un projet suffisamment ambitieux pour accueillir 200 places. Elle a donc pris contact avec les promoteurs de la résidence Alex qui désiraient développer un projet sur une parcelle voisine. En 2009, un accord est conclu avec ce partenaire privé qui accepte la construction de plusieurs étages de parking souterrain sous la parcelle où il compte bâtir la résidence. En échange, la commune accepte de céder les surfaces dont elle dispose sur laquelle le promoteur pourra bâtir des commerces. Elle ajoute dans la corbeille de la mariée 14 places de parc gratuites et s’engage à réaliser les travaux de consolidation du terrain, travaux qui sont nécessaires à la construction de l’immeuble. Jusque-là, il s’agit d’un simple échange de bons procédés qui pourrait profiter aux deux parties.
Un premier devis établi en 2010 - qui se monte à un peu plus de 18 mios - est soumis au Conseil général qui l’accepte. Mais très vite, ce devis s’avère insuffisant. Il gonfle rapidement à 25 mios et la commune sent qu’elle ne maîtrise plus les coûts. Elle fait alors appel à un AMO (soit un assistant au maître d’œuvre) et désigne, pour se faire aider et représenter, l’un des promoteurs de la résidence Alex. Elle est convaincue que cette solution permettra une collaboration maximale avec son partenaire privé. Au printemps 2013, une série de mandats sont confiés à l’AMO pour une somme de Fr 570'000.-. Pour un tel montant, la commune aurait dû se soumettre aux marchés publics, ce qu’elle omet de faire. Pour tenter de limiter la hausse des coûts, elle établit avec l’AMO une convention d’un style particulier : s’il parvient à diminuer les coûts, le bénéfice ainsi réalisé sera réparti à raison de 40% pour la commune et de 60% pour lui. Plus encore, s’il parvient à réaliser davantage de places de parc que celles prévues initialement, la répartition du supplément suivra la même règle, à savoir 40% du supplément pour la commune et 60% pour l’AMO. A ces conditions, l’AMO doit être suffisamment motivé pour entamer l’optimisation souhaitée. Un crédit supplémentaire de 2 mios de francs sera quand même réclamé au Conseil général, qui l’accorde sans broncher. On est à la fin de l’année 2013.
En 2015, le parking est achevé. Il s’agit de faire les comptes et d’opérer les répartitions convenues. C’est à ce moment-là (on est à fin 2016) que la commune décide d’acheter à son partenaire privé un terrain qui lui permet désormais d’abriter la presque totalité du parking. Cette transaction lui coûte encore Fr 480'000.- supplémentaires. Certains citoyens commencent à grincer des dents. Ils jugent la facture un peu lourde et réclament eux aussi des comptes, d’où la décision de la commune de soumettre le dossier à expertise.
Le rapport livré ces jours derniers raconte ce polar dans le détail et en tire quelques conclusions assez décoiffantes. Il souligne en bref les points suivants:
- la commune aurait dû faire appel aux marchés publics pour l’attribution du mandat de l’AMO;
- confier ce mandat au partenaire privé directement impliqué dans la construction limitrophe faisait naître le risque d’un conflit d’intérêt;
- le montant des honoraires de l’AMO est jugé par les experts très onéreux;
- la commune n’aurait pas dû acheter les terrains supplémentaires puisqu’il avait été convenu qu’elle pouvait créer son parking souterrain sous la parcelle de ses voisins;
- enfin, les montants réclamés par le partenaire privé à la commune au titre de la répartition des bénéfices réalisés en cours de construction sont contestés par les experts qui les estiment nettement surévalués, tout comme le nombre de places de parc revendiquées.
Quelques questions restent ouvertes:
- Comment se fait-il que la gestion de ce dossier ait été confiée au conseiller communal de l’époque, Eric Fumeaux, alors qu’il était associé professionnellement aux promoteurs de la résidence Alex?
- S’est-il par ailleurs récusé dès le début de ces transactions?
- Comment l’AMO rétribué pour défendre les intérêts de la commune a-t-il rempli son mandat?
- Au final, combien cette opération aura-t-elle réellement coûté à la collectivité?
A près de Fr 90'000.- la place (selon les estimations des experts), les citoyens bagnards auront quand même la fierté de pouvoir offrir à leurs hôtes le parking le plus cher d’Europe centrale.
Merci pour ces éclaircissements !
RépondreSupprimer